Le focus
vigneron
Interview Laura Poinsot du Domaine Poinsot Frères
LE 2 FÉVRIER 2022
Aujourd’hui, nous avons eu l’occasion de poser quelques questions à Laura du Domaine Poinsot Frères. Elle nous a transmis l’histoire du domaine familial ainsi que sa passion qui permet au vignoble de se développer année après année.
Initialement dans le domaine du marketing, depuis 8 ans, Laura travaille avec son père dans le domaine. Elle n’avait pas prévu de reprendre le domaine à la retraite de son père, mais à ses 27 ans, elle est revenue en Champagne et elle n’est jamais repartie. Une rencontre enrichissante et pleine d’histoire que nous vous partageons aujourd’hui.
Les histoires nous passionnent, racontez-nous la vôtre !
Le Domaine Poinsot est une histoire familiale qui remonte à l’époque de mes arrières grands-parents et de mon grand-père. C’est une culture et un patrimoine familial qui à l’origine ne faisait pas vivre ma famille. Le métier de viticulteur n’était pas aussi développé qu’aujourd’hui et ne permettait pas d’avoir des revenus stables. Mon grand-père était fermier et il travaillait à l’usine pour pouvoir faire vivre sa famille. C’est sous l’impulsion de mon père, qui a repris les parcelles et qui a replanté des vignes afin d’augmenter la taille de l’exploitation, que le domaine a pu se développer. À l’époque de mon père, le vignoble champenois a connu un essor. En 1985, il a commencé à travailler dans les vignes et 2 ans plus tard, il a repris définitivement l’exploitation. L’année passée, cela faisait 30 ans que notre première bouteille de champagne est sortie des caves.
À quoi ressemble une journée type dans le domaine Poinsot Frères?
Nous avons la chance de ne pas avoir de journée type. Le champagne est un travail saisonnier et aucune journée ne se ressemble. Néanmoins, tous les matins, nous organisions, moi et mon père, un rendez-vous avec nos équipes pour faire le point. On se répartit les tâches, mais surtout, nous changeons nos plans selon la météo. Nous ne pouvons jamais prévoir à quoi va aspirer notre journée. Par exemple, lundi matin, nous avons eu la surprise de voir de la neige en champagne. Ce n’était pas prévu et nos tâches ont changé.
De plus, nous avons parfois des commandes urgentes ou des touristes qui passent par là. Nous leur consacrons du temps pour leur faire découvrir le domaine.
Si vous deviez choisir, quelle serait votre cuvée favorite et pourquoi ?
Pour le côté sentimental, je dirais la cuvée Grand Héritage. Elle est vinifiée grâce à nos plus vieilles vignes qui ont plus de 40 ans. Ce sont mes grands-parents qui les ont plantées. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle s’appelle la cuvée héritage. Nous organisons nos vendanges en cueillant les raisins spécialement pour cette cuvée. On retrouve des arômes de fruit murs, de fruits confis avec une pointe d’eau-de-vie ou même de mirabelle. Il y a peu de bouteilles, car les vieilles vignes donnent moins de rendement.
Lors d’un repas, avec quoi accompagnez-vous une belle bouteille de champagne ?
C’est une suggestion purement personnelle, mais je dirais que j’associe un Blanc de Blancs Millésimé avec des huîtres ou plus généralement des fruits de mer. C’est un repas simple à manger, sans garnitures ni sauce, excepté du citron. On sent alors toutes les qualités du vins lorsque l’on associe les deux.
Qu’est-ce qui fait la particularité de votre Champagne ?
"On laisse le temps au temps"
Sans hésiter, le temps de vieillissement. On laisse vieillir nos bouteilles plus longtemps pour permettre une uniformisation des arômes au moment du dégorgement. La qualité est alors excellente et permet une finesse des bulles qui évite une agressivité en bouche. Pour vous donner un ordre d’idée, un champagne non-millésimé nécessite 15 mois de vieillissement, pour nous c’est 3 années. Pour un champagne millésimé, nous passons de 3 ans à 5 ans.
Votre vision du domaine dans 5 ans ?
Nous sommes actuellement dans une période de transition. En effet, mon père pense à sa retraite, c’est donc le moment de faire une transition et une transmission entre les générations. Bien sûr, ce sera une retraite administrative, il aura toujours un œil proche ou éloigné sur le domaine. Néanmoins, je reprendrais l’exploitation seule ou avec l’une de mes sœurs qui elle le souhaite.
Je souhaiterais également créer ma propre marque de champagne ; les bouteilles sont déjà en train de vieillir en cave. Je continuerais l’activité Poinsot Frères, car nous avons une clientèle fidèle et c’est l’histoire de ma famille et son héritage, mais j’envisage la création d’une plus petite gamme afin d’ajouter ma touche personnelle.
D’ici fin 2023, les premières cuvées devraient faire leur apparition. Il faudra attendre 5 ans pour les Millésime.
On a posé cette question à nos équipes, à votre tour ; Plutôt Blanc de Blancs ou rosé ? Pourquoi ?
Le Champagne rosé pour mon côté gourmand. Il a un côté fruité et j’adore ça. De plus, je suis une grande fan de pinot noir pour ses notes de fruit rouge, de griotte, de fraise et de framboise. Le pinot noir est un cépage qu’on retrouve sur la côte des Bars ou nous sommes installés.
Pourquoi avoir décidé d’être présent dans nos boxs mensuelles ?
J’ai découvert votre concept il y a quelque temps déjà sur Instagram. J’ai adoré l’état d’esprit, les visuels qualitatifs et les belles présentations des viticulteurs. Je trouve ça très intéressant votre façon de faire découvrir des vignerons que nous n’avons pas l’habitude de voir partout à travers des boxs mensuelles. Notre métier consiste à partager des découvertes gustatives et c’est ce que vous reflétez dans votre communication.
Un conseil pour nos bulleurs ?
Je dirais aux bulleurs de se faire plaisir tout simplement. Le champagne est fait avec du temps et de l’attention. Quand on s’image qu’il faut 5 ans pour déguster notre champagne millésimé, nous ne pouvons que conseiller d’apprécier le champagne. Il ne faut pas attendre de fêter une grande occasion pour ouvrir une belle cuvée. Il faut simplement célébrer les moments simples de la vie (toujours avec modération). Moi, j’adore déguster une bouteille pour fêter la fin de la semaine et le début du week-end.
Une petite anecdote pour la fin ?
Je n’ai pas d’anecdote précise en tête, mais des centaines provenant de ma grand-mère. Elle a contribué activement au développement du domaine. Quand mon grand-père allait travailler, elle était femme au foyer, mais elle travaillait également dans les vignes. Dès que l’occasion se présentait, elle me racontait tout le temps des anecdotes. Par exemple, elle était dans une parcelle et elle a aperçu un sanglier. Elle a eu si peur qu’elle est partie en courant alors que la pente était raide. Avec le recul, je me dis qu’elle a contribué à me transmettre cette passion familiale.
